Installé dans un canapé de l’arrière-salle de ce qui fut la première mosquée de Görlitz, Reda Errafi se désespère. « J’ai l’impression qu’on pourra toujours remplir les papiers qu’il faudra, la mairie ne nous donnera jamais l’autorisation de la rouvrir », explique cet affable ingénieur germano-marocain de 35 ans, arrivé en 2011 dans cette petite ville d’ex-Allemagne de l’Est accrochée à la Neisse, la rivière qui marque la frontière avec la Pologne. Ouvert début mars, le petit local commercial transformé en salle de prière a été fermé fin avril sur ordre de la mairie, qui conteste la légalité du changement d’usage du lieu.
Depuis, la moquette rouge, le minbar et les corans prennent la poussière. Et sur la porte, deux affiches, en arabe et en allemand, annoncent une « Fermeture temporaire » qui se prolonge… Pour Reda Errafi, toute cette procédure cache en réalité la réticence des autorités locales à voir une mosquée s’ouvrir à Görlitz. « Ici, c’est vraiment l’est de l’est de l’Allemagne », rappelle ce porte-parole improvisé de la communauté qui a étudié à Karlsruhe (Bade-Wurtemberg), avant d’être recruté à l’usine de train locale de Bombardier, plus gros employeur de cette ville de 55 000 habitants en déclin depuis la chute du Mur.
Avant 2015, Görlitz ne comptait qu’une poignée de musulmans comme Reda. Tout a changé avec la crise des réfugiés et l’installation dans la commune de 1 000 d’entre eux, dont 700 Syriens, en vertu de la politique de répartition allemande des demandeurs d’asile. Avec quelques musulmans syriens, qui préfèrent rester en retrait dans cette affaire de peur de perdre leur titre de séjour, l’ingénieur a pensé qu’il serait temps d’ouvrir un lieu pour abriter les prières des 80 à 100 pratiquants de la communauté.
Réputation sulfureuse
Comme souvent en Saxe, berceau du mouvement anti-islam Pegida, cette initiative a été très vite mal perçue. Plaintes du voisinage, propos insultants...