PROVOCATION - Quand il ne défie pas Kim Jong-Un et l'Iran à la tribune de l'Onu, Donald Trump prend le temps de s'intéresser à son pays. Et dans le nouvel épisode du fameux "Make America Great Again", ce sont les sportifs qui ont été pris pour cible.
Avec Donald Trump, c'est presque un jour, une insulte. Cette semaine, il a ainsi traité Kim Jong-Un de "Rocket Man", à la tribune de l'Onu. Mais le dictateur nord-coréen n'a pas été le seul à faire les frais des "mots doux" du président des Etats-Unis. Lors d'un meeting à Huntsville, en Alabama, ce dernier s'en est pris vendredi aux footballeurs de la NFL, la ligue de football américain.
Pour quelles raisons ? Le locataire de la Maison-Blanche ne goûte guère à l'habitude que certains joueurs ont pris depuis 2016 de refuser de se lever pour chanter l'hymne national, joué avant chaque match, en geste de protestation contre les violences policières à l'encontre des noirs américains. A la place, certains posent un genou à terre. Pas du goût du président qui les a traités de "f*** de p***". Tout simplement.
J'imagine que cela fait de moi, une p*** fièreLa mère de Colin Kaepernick
Dans cette saillie, il visait, sans le nommer, l'ancien "quarterback" des San Francisco 49ers, Colin Kaepernick. En août 2016, celui-ci s'était agenouillé pour protester contre plusieurs meurtres de Noirs par des policiers blancs. Kaepernick, 29 ans, est sans équipe depuis l'expiration de son contrat en mars. "Est-ce que vous n'aimeriez pas voir un de ces propriétaires de NFL dire, quand quelqu'un manque de respect à notre drapeau, 'sortez-moi ce fils de pute du terrain, il est viré, viré!'", a notamment lancé Trump.
En réponse, la mère de Colin Kaepernik a répondu "indirectement" à Trump sur Twitter : "J'imagine que cela fait de moi, une p*** fière", a-t-elle écrit.
Le président du syndicat des joueurs de la NFL a bien tenté d'éteindre la polémique en expliquant que les sportifs étaient aussi des "citoyens" jouissant de "droits constitutionnels". Le grand patron du Championnat, Roger Goodell, a quant à lui regretté dans un communiqué les "commentaires clivants" du président qui "montrent malheureusement un manque de respect pour la NFL".
Et les réactions ne se limitent pas à la NFL. Ce vendredi, Steven Curry, joueur des Golden State Warriors, vainqueur de la finale du Championnat de basket-ball (NBA), expliquait qu'il déclinerait une éventuelle invitation du président, une vieille tradition pour les équipes titrées dans l'un des grands championnats professionnels ou universitaires. "C'est évident, on ne va pas se précipiter pour prendre une décision dont il faut mesurer la signification", a-t-il dit sur la chaîne sportive ESPN, alors que la réception n'avait jusqu'ici pas été annoncée officiellement.
Son absence serait selon lui "une déclaration" qui "encourage l'unité, nous encourage à mesurer ce que cela signifie d'être Américain et se battre pour quelque chose". Il a confirmé plus tard qu'il ne voulait "pas y aller". Et bien sûr, Donald Trump lui a répondu. "Aller à la Maison Blanche est considéré comme un grand honneur pour une équipe du championnat. Stephen Curry hésite, donc l'invitation est retirée", a tweeté samedi le président américain à l'adresse du meneur-vedette des Warriors.
Sans s'arrêter là, il a poursuivi son réquisitoire à l'encontre des sportifs sur Twitter, toujours. "Si un joueur veut avoir le privilège de gagner des millions de dollars dans la NFL ou les autres sports, il ne devrait pas être autorisé à manquer de respect à notre beau et grand drapeau (ou notre pays). Il devrait se lever pour l'hymne national, sinon, IL EST VIRE", dit-il en reprenant sa célèbre phrase "You're fired".
Après cette série de tweets assassins, d'autres sportifs sont montés au créneau pour défendre Curry et Kaepernik. "Steph: considère cette annulation comme une distinction honorifique", a affirmé le syndicat des joueurs sur son compte Twitter. "Je me demande encore comment ce gars dirige le pays", a ironisé dans un tweet, Draymond Green, un coéquipier de Curry.
Lebron James a twitté : "T'es un clochard. Stephen Curry a dit qu'il ne viendrait pas. Donc il n'y a pas d'invitation. Se rendre à la Maison Blanche était un grand honneur avant que vous soyez là !", a écrit la plus grande star de la NBA.
Chris Paul, meneur de jeu des Rockets et président de l'association des joueurs de NBA, y va également de façon frontale : "Avec tout ce qui se passe en ce moment dans notre pays, vous êtes focalisé sur qui met un genou à terre ou non et qui va visiter la Maison-Blanche??? #Restedanstoncouloir. Et je doute qu'il fasse autant le bonhomme s'il appelait ces joueurs des fils de p*** en face"
Kobe Bryant lui, s'est fait un peu plus philosophe : "Un président des USA dont le seul nom crée la division et la colère ... dont les seuls mots inspirent le désaccord et la haine, ne peut pas rendre sa grandeur à l'Amérique".